A travers le projet de loi de sécurité publique présenté aujourd’hui en conseil des ministres, le gouvernement entend aligner le régime de la légitime défense des policiers sur celui des gendarmes.
Si le projet de loi est voté par le Parlement, les policiers pourront, à l’instar des gendarmes, ouvrir le feu dans quatre situations déterminées, après sommations :
1. Face à la menace de personnes armées.
2. Lorsqu’ils ne peuvent défendre autrement le terrain qu’ils occupent ou les personnes qui leur sont confiées.
3. Lorsqu’une personne cherche à se soustraire à leur garde et qu’ils ne peuvent l’arrêter autrement.
4. Lorsqu’ils ne peuvent arrêter autrement un véhicule en fuite.
Si l’on s’en tenait là, cette réforme pourrait paraître sur le papier une réelle avancée. Sauf que..
Le nouveau régime sera conditionné au respect de deux principes imposés par la Convention européenne des droits de l’homme et son article 2 qui consacre le droit à la vie, à savoir :
1. L’absolue nécessité.
2. La stricte proportionnalité.
La hiérarchie des normes consacre la supériorité du droit européen sur le droit Français. Dès lors, de facto, l’article 2 de la CEDH renvoie aux conditions de la légitime défense « classique » qui exige une riposte simultanée, nécessaire et proportionnée.
Il semble que le ministre de l’Intérieur Bruno Le Roux en soit d’ailleurs parfaitement conscient puisqu’il défend pour sa part un « progrès en matière d’unification des règles » [avec les gendarmes] mais précise immédiatement que « le gouvernement n’a pas la volonté de libéraliser les procédures d’ouverture du feu ».
La cour d’assises avait acquitté un gendarme ayant tiré sur un individu menotté et en fuite. Le militaire avait procédé à des sommations. Mais cela n’a pas suffi à la Cour européenne des droits de l’homme qui a considéré que le gendarme ne se trouvait pas en situation d’absolue nécessité. L’Europe a donc finalement condamné la France en 2014.
Il est hautement probable qu’à la prochaine affaire de même nature, les Juridictions créent de la jurisprudence et s’alignent sur la position de la CEDH rendant ainsi obsolète le nouveau texte de loi.
En l’état, France Police critique ce projet de réforme et dénonce une manoeuvre politique du gouvernement pour calmer la colère des policiers en essayant de leur faire prendre des vessies pour des lanternes.